Homélie du 5e dimanche du temps ordinaire

10 février 2019 Dimanche de la santé

Dans le livret qui nous était confié, par la Pastorale de la Santé, pour préparer ce jour, j’ai été impressionné par le témoignage de la maman de Kristel. Je vous le partage en grande partie.

« Ma fille Kristel est née avec une maladie appelée le « syndrome Pierre Robin » qui a été éprouvant jusqu’à son décès à l’âge de 18 ans.

À peine née, elle ne pouvait pas vivre sans aide. Son cœur ne battait pas normalement, sa langue obstruait l’œsophage [et sa fente palatine n’était pas fermée]. Ce fut un réel calvaire, rien ne fonctionnait. Elle a pleuré tant de fois ce corps blessé et douloureux.

Pour la soigner on la sondait, on la piquait, prélèvement d’un morceau de muscle et le plus dur fut la canule qui lui faisait très mal [lors du changement de sa couche les pieds en l’air.] Pendant deux ans Kristel a été stimulée, forçant la nature à faire son travail, à redresser ce qu’elle ne pouvait faire.

Moi, sa maman qui était tous les jours à ses côtés, j’étais désarmée, anéantie par autant de douleurs, et quand cela était possible je la prenais dans mes bras pour essayer de la soulager, pour lui dire et redire que je l’aimais.

Puis il a fallu qu’elle apprenne à être debout, à stimuler ses réflexes, à porter son attention sur un objet, elle était sans réaction ne sachant pas communiquer avec les infirmières.

[Et après de nombreuses opérations dont la fermeture du palais,] elle est partie dans un centre à Vernon. Moi, à ses côtés, toujours espérant nous retrouver un jour ensemble, en famille, avec sa sœur et son frère, je ne pouvais pas céder au désespoir, j’étais sa mère, elle était ma fille et je l’aurais suivie jusqu’au bout du monde. J’aurais tant voulu qu’elle me dise « je t’aime maman ».

À Vernon, rien n’était médicalisé ou presque, tout était plaisir et avec une équipe formidable. Kristel, petit à petit, a appris la tranquillité, les bains, les sorties, les jeux, elle a appris à se servie d’un fauteuil roulant et c’est avec celui-ci qu’elle a eu un accident mortel. Elle est partie vers un autre monde, celui du ciel.

Deux ans après le décès de ma fille des questions me taraudaient, mais le fait qu’elle ne soit plus là m’a ouverte à d’autres pensées plus grandes. Elles ont envahi mon esprit et j’ai cherché qu’en faire. Que dire de tout ce bouleversement ? Quelle route prendre ? Que faire de tout ce vécu ?

Toutes ces questions fourmillent et des changements s’opèrent en moi ; la volonté de vivre dans une autre harmonie, de retrouver de l’équilibre dans ma vie de tous les jours.

De l’épreuve que nous avons vécu Kristel et moi, de cet enfer, a jailli un renouveau.

Et ce renouveau m’a menée vers le Seigneur, je ne voyais pas d’autres direction, c’était la meilleure. Je pense qu’il m’a accompagnée, qu’il m’a portée, donné la force nécessaire et le courage de persévérer au côté de ma fille pour ne pas sombrer. Je lui rends grâce de la force qu’il m’a donnée.

[Toute petite déjà j’étais attirée par tout ce que je pouvais voir dans la vitrine de la bibliothèque paroissiale. Mais malgré mon désir je n’étais jamais allée au catéchisme, mes parents n’étaient pas d’accord, ils préféraient laisser les enfants choisir, mais j’avais en moi ce besoin.
Je me suis présentée aux prêtres et aux bénévoles de la paroisse. J’y ai rencontré des gens chaleureux, bienveillants, marraine, Fabienne, et avec eux tous j’ai cheminé vers mon baptême. Le Seigneur m’a entourée de personnes formidables pour redonner un sens à ma vie. Il fallait que je finalise cette victoire contre la mort avec Lui et en Lui. Renaître de mes cendres pour une juste vie vers sa lumière. Son amour sur moi, je marche, je respire avec Lui. Il m’a libérée de mon passé pour ne voir que l’avenir.
Avec Lui je m’engage auprès des plus faibles, je témoigne de son indéfectible amour, je relis ma vie à la lumière de l’Évangile. Ma vie commence. »]

Marie-Joëlle FERRERO, Livret Pastorale de la Santé, février 2019

Je m’arrête là pour souligner 2 choses

La première chose
Ne jamais oublier la place des accompagnants : une maman, des parents, des frères et sœurs, un époux, une épouse… leur présence est unique. On parle souvent des malades, ou du corps médical, mais les accompagnants de tous les jours.

La deuxième chose
Avec la maman de Kristel j’ai l’impression d’entendre de l’Évangile le dialogue : « Maître, nous avons peiné toute la nuit », « Sois sans crainte, Simon » lui-dit Jésus. Ou encore de saint Paul le « Je me suis donné de la peine plus que tous les autres ; à vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi. » et puis le « Me voici : envoie-moi ! » de la première lecture.

Les mots de la maman de Kristel le soulignaient avec justesse : « ce renouveau m’a menée vers le Seigneur, je ne voyais pas d’autres direction, c’était la meilleure. Je pense qu’il m’a accompagnée, qu’il m’a portée, donné la force nécessaire. »

AMEN

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